La facture d’énergie : nouvel objet politique électoral

Depuis une semaine, le sujet du prix de l’énergie est au cœur du début de campagne pour les élections législatives. Entre gel du prix du gaz, baisse du prix de l’électricité annoncée 6 mois à l’avance, révision des taux de TVA, on décrypte aujourd’hui la surenchère des annonces depuis une semaine.

La facture d'énergie en bonne place dans les programmes électoraux

L’énergie est devenue en quelques années l’un des pans les plus scruté des programmes électoraux. Et ces élections législatives n’échappent pas à la règle :
 

  • Alors qu’une hausse du prix du gaz de 11,7% est déjà prévue au 1er juillet prochain, le Rassemblement National via Jordan Bardella a été le premier à annoncer son intention de l’annuler en cas de victoire de son parti aux élections législatives. Il propose en sus d’abaisser à 5,5% la TVA sur l’énergie, y compris l’électricité (aujourd’hui de 20%) pour baisser les factures des Français, sans certitude de répercussion par les fournisseurs. D’après le député sortant RN Jean-Philippe Tanguy, la baisse des prix de l’électricité pourrait atteindre « au moins 40% » compte tenu du prix de production français.
     
  • En réponse, le ministre de l’Economie Bruno Le Maire s’est engagé à une baisse de 10 à 15% de la facture d’électricité au 1er février 2025. Une promesse reprise le week-end dernier par le Premier ministre Gabriel Attal, qui a confirmé une baisse de 15% « dès l’hiver prochain [soit] soit 200 euros de moins » sur les factures. D’après plusieurs observateurs, le potentiel de baisse pourrait être de plus de 20%, et ce malgré le rétablissement du niveau d’accise (taxe) sur l’électricité à son niveau d’avant bouclier tarifaire.
     
  • Pour compléter l’échiquier, le Nouveau Front Populaire propose – comme le RN – l’annulation de « la hausse programmée du prix du gaz au 1er juillet » qui sera en moyenne de +11,7%. En sus, cette coalition propose également d’annuler la hausse de 10% du prix de l’électricité entrée en vigueur au 1er février dernier.


Si les mesures diffèrent selon les programmes, tous partagent un point commun : présenter le prix de l’énergie comme un axe d’amélioration du pouvoir d’achat. Un changement de taille qui traduit un nouveau paradigme sur les questions énergétiques : les Français s’intéressent davantage au prix de l’énergie qu’à sa source. 

La facture d’énergie renvoie au second plan la rénovation énergétique

Problème : la surenchère des annonces depuis une semaine reproduit les mêmes erreurs qu’au moment du bouclier tarifaire de 2022. La question de la rénovation énergétique, pourtant la seule à même de faire baisser durablement la facture des Français, se retrouve invisibilisée dans le brouhaha des annonces. Pour preuve : si le Premier ministre a annoncé ce week-end une taxe sur les rachats d’actions pour financer la rénovation de 300 000 logements supplémentaires d’ici 2027, l’annonce s’est immédiatement retrouvée éclipsée par les énièmes déclarations des camps adverses sur une baisse de la TVA sur l’énergie.

Si la promesse d’une baisse de la facture d’énergie à court terme est séduisante sur le plan électoral, elle ne suffira pas à réduire durablement l’addition à l’inverse de la rénovation énergétique. Et pour cause : l’entrée en vigueur au 1er janvier 2027 d’un nouveau marché carbone (ETS2) applicable aux secteurs des bâtiments et du transport routier promet une nouvelle hausse des factures d’énergies fossiles. L’électricité étant une énergie décarbonée, l’ETS2 n’aura pas d’impact sur la facture d’électricité des Français. 

D’après des premières estimations, la brique ETS2 représenterait 13% du prix HT du gaz à horizon 2030 et grimperait à 18% pour le fioul. Une nouvelle hausse qui, à coup sûr, s’immiscera dans la campagne présidentielle de 2027 et continuera d’asseoir la facture d’énergie comme un objet politique électoral.

Victor Breheret

Chargé des Affaires Publiques chez Effy

Chaque semaine je décrypte à chaud l'activité législative au Parlement, les évolutions réglementaires d'aujourd'hui et de demain mais aussi les tendances politiques autour de la rénovation énergétique et l'autoconsommation solaire résidentielle.