Quelle précarité énergétique en France en 2021 ?

Mercredi 10 novembre 2021, c’est la Journée contre la précarité énergétique en France. L’occasion pour l’ONPE de faire un état des lieux du phénomène sur le territoire : combien de personnes sont en difficulté financière à cause de leurs factures énergétiques ? Pour quelles raisons ? Zoom.

La précarité énergétique en France en 2021

Arnaud Leroy, président de l’ONPE et de l’ADEME, l’a résumé simplement : “ça reste stable”. En effet :

 

  • En 2019, 3,5 millions de ménages sont en situation de précarité énergétique en France métropolitaine, soit environ 12% de la population française. Ces ménages, ont un taux d’effort énergétique supérieur à 8% et sont donc considérés en situation de précarité énergétique (autrement dit, les dépenses en énergie dans leur logement sont supérieures à 8 % de leurs revenus).
  • Le taux d’effort énergétique total des 20 % des ménages les plus modestes est près de quatre fois plus élevé que celui des 20 % des ménages les plus aisés (respectivement 16,0 % et 4,5 %)
  • On recense environ 4,8 millions de passoires thermiques en France, soit 16,7% du parc immobilier du territoire

 

Selon l’enquête de l’ONPE, ces données restent relativement similaires à celles des années précédentes. Ce qui change, en revanche, d’après diverses études, c’est le ressenti des Français quant à leur situation. En effet, les ménages semblent beaucoup plus inquiets qu’avant face au budget que représentent leurs besoins énergétiques :

 

  • 84 % des ménages estiment que la consommation d’énergie est un sujet de préoccupation important dans leur foyer (c’est le taux le plus élevé observé depuis la création du baromètre info-énergie du médiateur national de l’énergie en 2007)
  • 25 % des ménages ont rencontré des difficultés pour payer certaines factures énergétiques, contre environ 10% en 2019
  • 20 % des ménages déclarent avoir souffert du froid au cours de l’hiver 2020-2021 pendant au moins 24 heures (une augmentation de 43 % par rapport à l’année précédente)

🌍 Quelle situation en Europe ?

Selon l'ONPE, dans la grande majorité de nos voisins européens, le taux de population en situation de précarité énergétique est en fait plus élevé que chez nous : quand nous sommes à 11,9% l’Espagne ou l’Italie se situent entre 19 et 21,4%, par exemple. 

La difficulté de quantifier

Le problème ? Comme l’ont rappelé de nombreux intervenants au colloque de l’ONPE, les chiffres relevés par les différentes études peuvent difficilement correspondre à 100% à la réalité. En effet, la précarité énergétique est un phénomène qui relève de l’intime des ménages, et souvent, “on ne sait pas ce qui se passe chez les gens”. C’est ce qu’affirme Ksenia Vysotskaya, une photographe qui a choisi de montrer ces difficultés par la photographie, sur un site dédié.

 

L’ONPE le souligne également dans son dernier rapport : “de nombreux ménages passent à travers les mailles du filet de l’observation (et de l’action) : les foyers qui restreignent leur chauffage et leur mobilité en vue de parvenir à payer les factures d’énergie, les ménages qui choisissent de payer leurs factures d’énergie au détriment d’autres postes de dépenses”, etc.

 

L’un des enjeux aujourd’hui des acteurs qui luttent contre la précarité énergétique est donc de mieux identifier les ménages concernés. Autrement dit, assurer une remontée des données plus cohérente et complète pour mieux appréhender appréhender la situation et trouver les solutions adaptées.

Pourquoi la situation stagne ?

Nous l’avons vu, la précarité énergétique en France reste stable sur ces dernières années. C’est le résultat de plusieurs phénomènes qui se contrebalancent :

 

  • D’une part, les actions politiques en faveur de la transition énergétique, notamment pour la rénovation énergétique des bâtiments, se sont multipliées. On pense notamment aux dispositifs financiers récemment mis en place pour aider les ménages à réaliser des travaux chez eux (MaPrimeRénov’, bientôt MaPrimeRénov’ Sérénité…) Comme l’affirme le président de l’ONPE au colloque : “jamais il n’y a eu autant d’argent” alloué à ces causes.
  • Malheureusement, les effets de ces efforts sont estompés par les fortes hausses des prix de l’énergie subis cette année par les ménages : +59% pour le gaz et +55% pour le fioul depuis janvier 2021, par exemple. Les taxes énergétiques augmentant elles aussi, la facture des français n’a fait que s’alourdir, pour placer certains dans une situation de précarité énegétique telle que nous l’avons définie. Des aides supplémentaires ont été consenties par le gouvernement, telle que la prime inflation de 100 € pour les ménages aux revenus les plus modestes, mais ce montant reste insuffisant aux yeux de plusieurs acteurs qui se sont exprimés au colloque de l’ONPE.

 

C’est Philippe Pelletier, président du Plan Bâtiment Durable, qui apporte une bonne conclusion à notre bilan de la précarité énergétique en France en 2021 : “le travail de transformation de la société autour de l’éradication de la précarité énergétique” s’inscrit dans la durée et “est suffisamment considérable” pour y parvenir d’ici l’année 2050. Mais en attendant, pour le dire simplement : il y a encore “beaucoup de boulot”.

Amandine Martinet

Journaliste web pour Effy

Journaliste diplômée de l’Institut Français de Presse, je suis passionnée par les questions liées à la transition énergétique et à l’habitat. Ma mission ? Écrire pour vous aider à être bien chez vous au quotidien !

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