Bilan en demi-teinte pour la filière bâtiment au premier semestre 2022

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La Fédération française du bâtiment a dévoilé, ce mardi 13 septembre, les chiffres du secteur au premier semestre 2022. Si les carnets de commandes sont bien garnis et l’activité des entreprises globalement au beau fixe, l’organisation professionnelle appelle à la prudence. En effet, le risque de récession est bien présent pour 2023. Dans ce contexte, comment agir pour soutenir la filière ? Retour sur les propositions de la FFB.

Olivier Salleron Septembre 2022

Olivier Salleron, président de la FFB, revient sur les chiffres du premier semestre 2022

En décembre 2021, la Fédération française du bâtiment (FFB) estimait à 4,3%, la croissance du secteur sur l’année 2022. Depuis, ces perspectives ont été revues à la baisse (+ 3,8%). Le contexte inflationniste laisse en effet craindre un risque de récession en 2023. Et si les entreprises du bâtiment ont jusqu’à maintenant résisté, enregistrant une croissance de + 3,9% au premier semestre 2022 par rapport à la même période l'an passé, qu’en sera-t-il dans les prochains mois ?

Matériaux, les tensions persistent

Un des facteurs de blocage évoqué par Olivier Salleron est la crise des matériaux. Si le PVC, le cuivre et l’acier affichent un repli entre juin et août 2022, les plastiques alvéolaires, les produits plats en acier, les tuiles et les demi-produits en aluminium continuent à progresser de + 9%, + 4,8%, + 3,9% et + 3,4% respectivement entre mai et juillet 2022.

 

« L’énergie s’envole de nouveau avec, à fin août, une explosion des prix de + 166% pour le gaz naturel et de + 142% pour l’électricité », a pointé Olivier Salleron. « Les matériaux intensifs en énergie à l’instar des aciers, du verre, de l’aluminium, des tuiles, des produits céramiques… connaîtront malheureusement des nouvelles hausses dans les prochains mois. Certains industriels ont même jusqu’à fermé des lignes de production, d’autres devraient suivre », a-t-il poursuivi. Le risque de pénurie est donc là.

 

« Sous l’effet de ces hausses, les coûts des entreprises ont déjà progressé de 12% entre la fin 2020 et juin 2022, selon l’index BT01 de l’Insee ». Et ce n’est pas fini, a avancé Olivier Salleron. L’inflation pèse aussi sur les coûts de main d’œuvre. Les trésoreries « se tendent ».

 

Lire aussi : Crise des matériaux, la filière bâtiment signe une déclaration commune d'engagement

La rénovation toujours dans le vert

En termes d’activité, la crise du logement se confirme. Le neuf est fragilisé : - 3,2% pour les mises en chantier et + 13,9% pour les autorisations. Et les ventes s'écroulent : - 26,7% dans l'individuel diffus et - 14,6% pour la promotion immobilière.

 

Dans son point conjoncture, la Fédération française du bâtiment note plusieurs éléments qui peuvent expliquer que les ménages empruntent moins et remettent leurs projets à plus tard :

 

  • Le taux d'épargne poursuit son repli au deuxième trimestre 2022, renouant ainsi avec son niveau d'avant-crise
  • Les taux d'intérêt se redressent
  • La hausse des taux « pose la question du niveau du taux de l’usure »

 

Du côté de l’amélioration-entretien, les voyants sont au vert. La tendance ressort proche de 2% pour l’ensemble, comme pour la rénovation énergétique. Bien qu’en croissance, la FFB estime que ces chiffres sont « un peu » décevants.

 

Elle pointe des aides (MaPrimeRénov', Certificats d'économies d'énergie) trop faibles et trop volatiles qui ne permettent pas toujours aux ménages d'engager des travaux, notamment s'il s'agit d'une rénovation globale. « Nos concitoyens sont totalement perdus au niveau des aides, encore plus que nos artisans et nos entreprises. Mais on ne pourra pas réussir s’il n’y a pas un plan ».

 

A cela vient s'ajouter un taux d'épargne en repli à 15,5% sur le deuxième semestre 2022, niveau similaire à la période avant-crise sanitaire. 

 

Pour accélérer la rénovation énergétique, « il suffit de relancer une politique plus ambitieuse. 98% des discours vont dans ce sens. Aujourd’hui, c’est de l’investissement pour l’Etat mais comme diraient certains économistes, c’est de la bonne dette, c’est investir pour la suite, pour moins consommer, pour que nos concitoyens gagnent en pouvoir d’achat. Il faut qu’il y ait une vraie prise de conscience ».

Des propositions pour soutenir l'activité du bâtiment

Les Assises du BTP, qui devraient avoir lieu le 22 septembre prochain, doivent permettre de répondre aux attentes du secteur. La FFB attend de ce rendez-vous qu’il soit une nouvelle étape vers la constitution d’un « véritable » Conseil national de la construction. Cette instance permettrait d'être « au plus près des mesures et des demandes de l'ensemble de la filière ».

 

Dans le cadre de ces Assises, la fédération a d’ores et déjà formulé des propositions, par exemple, la mise en place d’un Observatoire des matériaux pour comprendre et anticiper les évolutions de prix à l’amont de la filière.

 

En termes de transition écologique, la fédération propose une indexation des aides à la rénovation énergétique sur l’inflation, « le relèvement des obligations d'économie d'énergie pour la cinquième période des CEE ou encore la mise en œuvre effective de l’écocontribution REP neuf mois après publication des tarifs, toujours inconnus à ce jour ».

 

« Attention aux petits pas. Pour rendre la bâtiment et son activité pérenne dans les prochaines années, soyons ambitieux », a enfin souligné Olivier Salleron, appelant au déploiement d’une « stratégie durable et financée ».

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