Bouclier tarifaire: des évolutions, et des réponses structurelles à apporter rapidement !

Le Réseau Action Climat a récemment publié son « panorama des dépenses publiques néfastes au climat et à l’environnement prévues dans le budget de l’Etat pour 2023 » dans lequel sont comptabilisées les dépenses du bouclier tarifaire. Dans la même temporalité, la Direction générale du Trésor a publié une note sur la répartition des pertes dues à la dégradation des termes de l'échange énergétiques qui met notamment en exergue le coût des mesures de soutien en 2022 pour faire face à l’envolée des prix de l’énergie.

Des montants très importants, certes justifiés par la situation de crise énergétique, qui interrogent sur le ciblage mais aussi les faibles moyens déployés pour les politiques publiques structurelles que sont la rénovation énergétique et l’autoconsommation solaire.

Le coût faramineux du bouclier tarifaire en 2022, prolongé en 2023

La note de la Direction Générale du Trésor met en exergue que les mesures de lutte contre la hausse des prix de l’énergie en 2022 dépassent les 40 milliards d’euros. Pour rappel, début septembre, le Ministère de l’Economie et des finances avançait, à date, un montant de 24 milliards d’euros, ce qui représentait déjà dix fois le budget de MaPrimeRénov’ prévu pour 2023.

Pour 2023, la note pour les finances publiques ne devrait pas être moins salée selon le Réseau Action Climat. Parmi les 67 milliards d’euros de dépenses néfastes au climat recensées dans le projet de loi de finances 2023 on retrouve le coût brut du bouclier tarifaire évalué à 45 milliards d’euros[1]. Le choix du référencement du coût des mesures visant à amortir la hausse du prix de l’électricité dans les dépenses néfastes au climat est justifié par le Réseau Action Climat par le fait que « l’électricité consommée en France dépend encore en partie des énergies fossiles, et ce de manière plus importante avec la réouverture de la centrale à charbon de Saint Avold mais aussi avec des importations d'électricité, elle-même plus carbonée ». Par conséquent, la meilleure efficacité énergétique et climatique des logements et la décarbonation de notre production d’énergie sont des évolutions incontournables.

Le manque de moyens alloués actuellement aux réponses structurelles permettant de limiter puis de sortir du bouclier tarifaire

L’institute for Climate Economics (I4CE) a récemment publié une note qui compare les engagements financiers pour la transition écologique pris par Président de la République lors de sa campagne électorale, avec ce que prévoit le PLF 2023. Selon l’Institut « avec 3,5 milliards de plus par rapport à 2022, le budget 2023 fait un tiers du chemin prévu » qui était de 9,5 milliards d’euros. Du côté des crédits alloués à la rénovation thermique des bâtiments, l’institut estime que la hausse aurait dû être de 2,6 milliards d’euros alors que le PLF 2023 ne prévoirait qu’1,6 milliards. Comme nous l’avions déjà mis en exergue, le budget de MaPrimeRénov’ pour 2023, si on prend en compte le PLFR 2022 n°1 voté l’été dernier, n’augmente que de 50 millions d’euros par rapport à 2022[2]. On est donc loin des ambitions budgétaires permettant d’accélérer la rénovation énergétique des bâtiments. Comme le rappelle la note de l’I4CE « Pour anticiper et réduire la facture des prochaines crises, il faut garder le cap et continuer à investir ». Par conséquent, l’accélération tant attendue des rénovations énergétiques des logements, bouclier structurel face à l’envolée des prix de l’énergie, devra passer par un investissement financier plus conséquent. Accélérer la rénovation énergétique et développer l’autoconsommation solaire résidentielle, c’est économiser à terme des dépenses colossales de bouclier tarifaire.

Cibler à terme le bouclier tarifaire

Dans son étude, le Réseau Action Climat estime que le bouclier tarifaire est anti-redistributif et finance la consommation d’énergie des ménages les plus aisés. Si le bouclier tarifaire est une solution d’urgence nécessaire pour endiguer les conséquences de l’explosion des prix de l’énergie, il n’en demeure pas moins qu’après sa mise en place en octobre 2020, sa prolongation sur l’année 2023 aurait pu être ciblée, sur le modèle du chèque énergie.

En effet, la compensation partielle de la hausse des prix de l’électricité et du gaz, plafonnée à 15%, se justifie pour les ménages les plus précaires, plus exposés à la précarité énergétique. En revanche, les publics les plus aisés, sont moins exposés et peuvent davantage absorber cette hausse. Le signal prix de l’énergie renforcerait le retour sur investissement des travaux de rénovation énergétique à travers une baisse de la facture énergétique et une valorisation du bien après travaux. Or, l’annihilation partielle de ce signal prix via le bouclier n’incite pas ces publics à déployer ces réponses structurelles qui participeront également à sortir de la crise et à renforcer notre souveraine énergétique sur le temps long.

[1] 33,8 milliards pour l'électricité et 11,1 milliards pour le gaz
[2] Sous réserve du projet de loi adopté définitivement

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