« Analyse économique et économétrique du dispositif CEE » ou l’opportunité d’une étude à charge sur les CEE

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Une récente étude publiée par les Mines ParisTech, propose de mesurer l’efficacité des certificats d’économie d’énergie (CEE). L’étude, très à charge contre les CEE, s’invite dans le débat actuel sur les modalités de la 5ème période du dispositif en proposant de remanier de fond en comble cette politique publique.

Une objectivité questionnable

Voilà que le débat sur la 5ème période du dispositif s’accélère et qu’au même moment une étude sort pour discréditer toute la politique publique actuelle. Du niveau de l’obligation aux dispositifs « coup de pouce », rien n’est à garder, il faut tout réformer.

 

Cette radicalité peut interroger sur la crédibilité et l’objectivité de cette étude : Premièrement, celle-ci a été commandée et financée par les acteurs qui portent l’obligation à l’origine même du dispositif ; Deuxièmement, elle sort à un moment opportun : celui de la fixation par l’administration du niveau d’obligation pour la 5ème période. Mais au-delà de ces deux éléments, il est intéressant de regarder les arguments avancés par les auteurs de l’étude pour demander une révision du dispositif.

5 arguments pour réformer le dispositif

L’étude propose une analyse économique du dispositif en s’intéressant à trois aspects : l’impact du dispositif sur les économies d’énergie ; l’efficience de celui-ci ; l’efficacité dynamique, c’est à dire son impact sur la dynamique d’évolution des coûts de la rénovation énergétique. De cette étude ressort cinq grands arguments justifiant une remise à plat du dispositif :

 

  • « L’obligation de la 4ème période du dispositif (2018-2021) a été imparfaitement calibrée » : Pour les auteurs de l’étude il n’y aucune adéquation entre le courbe du gisement des économies d’énergie, à savoir les volumes disponibles et leur coût. En d’autres termes, il sera compliqué de remplir l’obligation totale pour les principaux obligés. Pour autant, la semaine dernière lors du dernier comité de pilotage du dispositif CEE, le Chef du service du climat et de l’efficacité énergétique, Olivier David a indiqué que le rythme des dépôts actuel était en phase avec l’atteinte de l’obligation. Un petit stock de dépôts serait même à prévoir en fin de période ! A noter, que ce rythme des dépôts devrait s’accélérer puisque plusieurs « grands obligés » ayant des stocks de CEE datant de plus d’un an, ont demandé un allongement du délai de dépôt des dossiers auprès du Ministère.

 

  • « Les fiches d’opération surestiment l’impact énergétique des opérations » : Sur ce point, l’étude à raison mais cela est inhérent à la méthode d’élaboration des fiches d’opérations, basée sur des calculs théoriques. La pratique au quotidien nous permet de mieux apprécier la réalité des économies d’énergie générées. A ce titre, durant la 4ème période, le Ministère a révisé le forfait de près de 25% des fiches d’opérations standardisées dans le secteur résidentiel. Cette analyse ex post des fiches est tout à fait saine, elle permet d’adapter le dispositif à la réalité du terrain.

 

  • « Le volume des travaux avec « Coup de Pouce » a suivi peu ou prou le rythme général des travaux CEE ». Très critique sur cette bonification, les auteurs de l’étude jugent que le bilan du dispositif « Coup de Pouce » est négatif. Sans rentrer dans les détails, l’étude ENEA commandée par l’ATEE avait dressé un bilan bien plus positif de cette bonification, jugeant qu’elle avait eu au contraire, un impact très positif sur la production de CEE. Les 4 opérations donnant droit à bonification (Pompe à chaleur, chaudière gaz THPE, isolation des combles et des sols) ont connu une croissance de 128% entre 2018 et 2019. Par ailleurs, ces 4 opérations ont représenté 45% du total de la production de l’ensemble du dispositif CEE pour l’année 2019 !

 

  • « Une qualité moyenne de la rénovation énergétique des logements qui reste faible » : La qualité des travaux est un véritable enjeu de réassurance. Pour s’assurer de la qualité des opérations, il faut augmenter les moyens de contrôle. En ce sens, Effy demande à ce qu’un budget de 25 millions d’euros soit dédié pour la réalisation de contrôle sur site aléatoire. Cette enveloppe permettrait de contrôle plus de 100 000 opérations de rénovation énergétique.

 

  •  « Une forte instabilité réglementaire » : Pour les auteurs, l’instabilité réglementaire pose 3 problèmes : elle décourage l’industrialisation des travaux, elle rend peu lisible le dispositif, elle augmente les risques financiers pour les obligés. Le constat est vrai, mais le dialogue constant des acteurs avec l’administration permet d’adapter facilement le dispositif. Cela a été le cas avec la prolongation de la 4ème période qui permis de soulager la tension existante au sein du dispositif. Cette co-construction du dispositif est à saluer. A noter que l’étude fait 17 propositions pour réformer le dispositif… l’instabilité réglementaire n’est donc peut-être pas terminée.

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