Le Plan de Relance permettra-t-il de mettre fin aux « passoires thermiques » ?

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Jeudi 3 septembre, le Premier Ministre, Jean Castex déclarait sur RTL qu’il fallait « mettre un terme le plus vite possible aux passoires thermiques ». Le Gouvernement conscient de l’ampleur du travail a donc décidé de flécher 2 milliards d’euros supplémentaires pour aider les particuliers à engager des travaux de rénovation énergétique via le Plan de Relance, mais cela apparaît encore insuffisant… Explications.

Des passoires thermiques encore trop nombreuses…

Depuis 2017 et la présentation du plan de rénovation énergétique des bâtiments, la priorité de la politique de soutien à la rénovation énergétique est tournée vers les ménages en situation de précarité énergétique, habitant dans les logements considérés comme des « passoires thermiques ». Début septembre, le Ministère de la Transition écologique a présenté une étude montrant l’étendu du chantier de rénovation énergétique de ces passoires. En effet, sur les 29 millions de résidences principales au 1er janvier 2018, environ 4.8 millions de logements (soit près de 17% du parc) seraient très énergivores (étiquettes F et G du DPE) et en grande partie occupés par des ménages modestes (deux premiers quintiles).

 

Cette étude du Ministère est particulièrement intéressante puisqu’elle permet de visualiser la performance énergétique des logements en fonction de leur typologie d’énergie. En raisonnant en énergie finale (consommation supérieure à 260 kWh/m²/an), les passoires thermiques sont chauffées principalement au fioul (50%) et au gaz (45%). Comment expliquer cette prédominance des énergies carbonées dans les passoires thermiques ? Tout d’abord, l’étude explique que « le rendement des chaudières utilisant des combustibles, tels que le gaz, le fioul ou le bois est généralement inférieur à celui des systèmes de chauffage électrique ». Par ailleurs, d’autres énergies de chauffage que l’électricité sont privilégiées par les particuliers dans les logements où les besoins en chauffage sont plus importants.

Un Plan de Relance pour doper la rénovation énergétique

Le Plan de Relance présenté début septembre a porté une attention particulière à la rénovation énergétique des bâtiments. En consacrant près de 7 milliards d’euros à cette politique publique, le Gouvernement souhaite faire de la rénovation énergétique un véritable levier de relance économique durable et de préservation du pouvoir d’achat.

 

Les particuliers bénéficieront d’une enveloppe de 2 milliards, sur deux ans, allouée au nouveau dispositif d’aide à la rénovation énergétique : MaPrimeRénov’. Ce dispositif présente de nombreux avantages : primes fixes, rapidité d’obtention, cumul simplifié avec les autres dispositifs de financement.

 

Par ailleurs, le Gouvernement souhaite accélérer sur la rénovation globale (plusieurs gestes de rénovation simultanée) afin d’accélérer le rythme des rénovations. A ce titre, il est prévu d’instituer une aide supplémentaire pour encourager les foyers à engager des bouquets de travaux, pouvant par exemple, englober l’isolation des combles et l’installation d’une pompe à chaleur. Cependant, s’agissant des ménages les plus modestes, bouquets de travaux ou pas, il demeure nécessaire d’accroître le soutien financier, pour réduire le reste à charge des travaux qui reste un frein majeur.

La Question du « reste à charge » oubliée du plan de relance

Les aides à la rénovation (MaPrimeRénov, Certificats d’économies d’énergie…) permettent aujourd’hui de financer au maximum 90% des travaux de rénovation énergétique chez un ménage très modeste. Si cela s’avère conséquent, le reste à charge qui s’élève en moyenne à 1500 euros pour le changement d’un système de chauffage bloque le passage à l’acte de ces messages et ne permet pas de donner une impulsion suffisante à la dynamique de rénovation énergétique. En additionnant les milliards supplémentaires, le plan de relance ne s’est pas préoccupé de cette question alors même que des outils existent déjà pour répondre à cette problématique. L’Eco-Prêt à Taux Zéro (EPTZ) ainsi que le Fonds de Garantie pour la Rénovation Energétique (FGRE) pourraient parfaitement remplir cette mission pourtant ils sont très peu utilisés…

 

Pour rappel, en 2019, les ménages modestes représentent moins de 5% des 36 000 éco-PTZ distribués pourtant ce sont ces ménages qui ont besoin d’un accompagnement spécifique pour financer le reste à charge des travaux. Pour permettre d’augmenter ce taux de délivrance, le député Anthony Cellier avait émis une idée intéressante fin juin : Une banque de dernier recours. Un ménage qui aurait fait deux demandes d’éco-PTZ auprès d’une banque et se serait vu opposer deux refus pourrait se voir octroyer un prêt par une banque de derniers recours désigné par la puissance publique. Le prêt octroyé à ce ménage ferait automatiquement l’objet d’un cautionnement par le fonds de garantie pour la rénovation énergétique (FGRE), dispositif qui n’est à ce jour pas opérationnel.

 

On le voit, des dispositifs existent pour accompagner la rénovation énergétique des passoires thermiques occupées par les ménages modestes, encore faut-il lever certains freins réglementaires…

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