Désembouage : “Une pompe à chaleur embouée entraîne une surconsommation de 27%”

[INTERVIEW] Le désembouage est un geste indispensable pour permettre à une installation de chauffage de fonctionner correctement. Encore faut-il savoir quand et comment le faire ! Quels signes permettent de savoir qu’il faut désembouer son réseau, quelles sont les conditions propices à un embouement, et qu’implique la création d’une aide CEE désembouage ? Cyril Radici, Directeur général du Synasav, syndicat national de la maintenance et des services en efficacité énergétique, nous répond.

Effy.fr : Pouvez-vous nous présenter le Synasav ?

Cyril Radici : Le Synasav est une organisation professionnelle qui existe depuis 1966. Notre rôle est d’accompagner sur les plans réglementaire, social, fiscal, de défense de la profession et au niveau de la formation, les professionnels qui réalisent l’entretien, la maintenance, le remplacement et l’installation d’équipements dans les logements individuels. A ce jour, l’organisation compte un peu plus de 850 entreprises réparties sur l’ensemble du territoire.

 

 

Qu’est-ce que le désembouage ?

Le désembouage concerne les équipements de chauffage qui fonctionnent avec un réseau de chauffage central. Dans la plupart des installations, il y a un système de boucle à eau chaude. Cette boucle renferme de l’eau chauffée par un générateur (une pompe à chaleur, une chaudière), qui circule en permanence dans un circuit fermé pour chauffer l’habitation. 

 

Il est nécessaire de maintenir une bonne qualité de l’eau dans ce réseau car lorsqu’elle n’est pas vérifiée, elle se dégrade. A force de tourner et de chauffer, l’eau du système vit un certain nombre de perturbations qui créent de la boue. Le désembouage consiste donc à enlever la boue présente dans le réseau de chauffage.

 

Quels sont les signes qui permettent de savoir qu’il faut désembouer le réseau ?

Le premier est la consommation. Quand le réseau est emboué, il consomme plus d’énergie pour produire la même chaleur car des sédiments se collent sur les émetteurs. 

 

On constate une surconsommation de 17% sur un réseau de chaudière embouée. Cette surconsommation monte à 27% dans le cas d’une pompe à chaleur.

 

Ensuite, lors de la visite d'entretien annuelle de la chaudière ou de la pompe à chaleur, le professionnel procède à un test de turbidité. Il sort alors de l’eau de la boucle à eau chaude et vérifie sa turbidité, c’est-à-dire, sa transparence. Si elle commence à changer de couleur, c’est signe qu’il y a quelque chose à l'intérieur et qu’il faut agir.

 

Si le professionnel a des doutes, il peut faire des prélèvements à envoyer en laboratoire, et avoir une analyse complète.

 

Enfin, les techniciens de maintenance sont souvent équipés de caméras thermiques. Le système de chauffage est en pleine chaleur donc rouge. Les zones bleues correspondent quant à elles à des zones de dépôts de sédiments. S’il y en a, cela montre que le radiateur est moins performant car il y a de la boue dedans.

 

Notez que quand un réseau est emboué, le générateur se détériore plus facilement et nécessite des interventions plus fréquentes. 1 panne sur 3 est aujourd’hui liée à une mauvaise qualité de l’eau. Il ne faut donc pas voir le désembouage comme un poste de dépenses, mais comme une économie future.

 

Est-ce qu’il y a des conditions propices à l’embouement d’un système ?

Ce qui dégrade l’eau, c’est sa perméabilité : dès qu’il y a un peu d’air qui circule à l'intérieur, ça altère la qualité du réseau d’eau. 

 

Sur la pompe à chaleur, un autre phénomène accélère l’embouement d’une installation : il y a des sections de réseau plus étroites. Lorsque la température d’eau chaude est plus importante, cette configuration favorise l’embouement de l’installation.

 

En moyenne, la pompe à chaleur est 20 à 30% plus embouée qu’une chaudière.

 

Comment se passe concrètement un désembouage ?

Le désembouage consiste à installer une pompe dans le logement qui permet de faire circuler de l’eau où l’on a injecté des produits inhibiteurs non agressifs. L’eau circule alors à vitesse rapide et permanente, ce qui permet de fluidifier la circulation dans toute la maison, et de décoller les sédiments qui, avec le temps, se sont greffés sur les émetteurs.

 

Ensuite, la pompe est vidangée, et de l’eau est réinjectée avec un inhibiteur qui va cette fois, protéger l’installation. Après le désembouage, il est impératif d’installer un pot à boue proche de son générateur qui permet de piéger les futures boues. Au moment de l’entretien annuel, le professionnel pourra juste vider ce pot.

 

Selon la taille de l’installation, le désembouage peut durer d’une demie journée à 2 ou 3 jours.

 

Nous déconseillons aux particuliers de se lancer dans le désembouage de leur installation. Au moindre faux pas, le système doit être remplacé. Le mieux est donc de faire appel à un professionnel qui a des garanties et remplacer le matériel s'il est détérioré suite au désembouage.

 

Une aide CEE désembouage a été créée à l’automne. Qu'est-ce que ça implique ?

On a normé le désembouage, avec toutes les étapes à suivre pour un désembouage réalisé dans les règles de l’art.

 

Ce qui change pour le particulier, c’est qu’il peut bénéficier d'une aide financière qui n'est, à notre sens, pas encore suffisante. Elle est aujourd’hui d’environ 50€, ce qui n’est pas assez quand on sait qu’un désembouage coûte en moyenne entre 600 et 700€, voire plus selon la taille de l’installation. 

 

Nous allons donc rouvrir ce dossier du CEE désembouage avec la Direction générale de l’énergie et du climat pour tenter de multiplier cette aide et de créer des aides supplémentaires.

 

Quels sont les atouts du désembouage en 3 mots ?

En 3 mots : 

 

• maintien de performances de l’équipement ;
• durabilité de l’équipement ;
• on agit pour la planète car on consomme moins d’énergie, on pollue moins et on fait des économies.