Appelez-nous !

du lundi au vendredi - 8h à 19h

Service gratuit + prix appel

Financement du reste à charge des ménages modestes : un immense défi toujours à relever

La session de questions parlementaires sur la rénovation énergétique des logements qui s’est tenue en début de semaine dernière[1] a notamment porté sur le sujet du financement du reste à charge des travaux d’amélioration de l’efficacité énergétique et climatique du logement. Le ministre chargé du logement, Olivier Klein, a notamment communiqué de nouveaux chiffres et a annoncé rencontrer prochainement les acteurs bancaires aux côtés du ministre de l’Economie et des Finances, Bruno Le Maire. L’occasion de faire le point sur les prêts conventionnels dédiés à la rénovation énergétique et de donner quelques idées aux pouvoirs publics pour résoudre le problème du financement du reste à charge des ménages modestes et très modestes.

Contexte : des montants de reste à charge conséquents

Malgré des aides plus importantes issues de MaPrimeRénov’ et des Certificats d’économies d’énergie (CEE) pour les ménages les plus modestes, les restes à payer pour les travaux de rénovation énergétique demeurent une barrière. En effet, le premier rapport du Comité d’évaluation du Plan de Relance[2] met en exergue qu’une fois les deux aides cumulées, les ménages très modestes ont en moyenne un reste à charge de 38,6 % sur le prix des travaux. Ce montant dépasse 50% pour les ménages modestes. En valeur, les restes à charge augmentent avec le prix des travaux. Dans un contexte où il est nécessaire d’impulser des parcours de rénovations plus ambitieux avec des étapes comportant plusieurs gestes de travaux, il demeure donc également essentiel de trouver des solutions effectives de financement dédiées à la rénovation énergétique des logements des ménages les plus modestes.

Eco-prêt à taux zéro : un manque d’accès des plus modestes

Après un bilan 2020 en demi-teinte, celui des éco-prêts à taux zéro (Eco-PTZ) émis en 2021[3] est meilleur sur le plan quantitatif avec 61 034 prêts émis sur l’année (vs 42 107 en 2020). Cependant la problématique de l’accès des ménages les plus modestes persiste. En effet, comme en 2020, seulement 7% des Eco-PTZ ont été distribués en 2021 à des ménages modestes et très modestes[4]. Le nombre d’Eco-PTZ Habiter Mieux, dédié aux plus modestes a certes augmenté, mais il ne représente qu’un peu plus de 400 prêts ce qui est demeure toujours dérisoire. Pourtant, l’Eco-PTZ Habiter mieux bénéficie d’une garantie au titre du FGRE.

Ces chiffres témoignent d’un échec de ce prêt qui est pourtant un complément idéal à MaPrimeRénov’ et aux primes issues des CEE. Une simplification du volet administratif de l’Eco-PTZ en cas de demande parallèle de MaPrimeRénov’ est entrée en vigueur au 1er juillet dernier. Cependant, nous doutons que cela puisse apporter une réponse concrète à la problématique structurelle de très faible délivrance du prêt aux ménages modestes qui sont pourtant les publics qui en ont le plus besoin.

Prêt Avance Rénovation : un démarrage aux résultats inexistants

Le prêt avance rénovation (PAR), innovation proposée par la mission conduite par Olivier Sichel (dont nous étions membres) est une mesure phare du volet rénovation énergétique de la loi Climat -Résilience. Ce prêt hypothécaire visant à financer des travaux de rénovation énergétique des ménages les plus modestes[5] est garanti grâce à la valeur du logement puisque le remboursement du capital voire parfois des intérêts se réalise lors de la vente ou de la succession du logement. Ce prêt bénéficie également de la garantie du FGRE pour les ménages aux ressources très modestes et modestes . Seulement 3 banques ont distribué ce prêt (La Banque Postale, Le Crédit Mutuel, Le CIC) en 2022, ce qui témoigne d’un faible engouement des acteurs bancaires pour ce dispositif. Au total, ce serait seulement 36 prêts qui auraient été émis depuis février 2022 pour un montant moyen de 20 860€ par ménage, selon Ministre chargé du logement, Olivier Klein. Face à ces résultats dérisoires, le Ministre a indiqué « que les retours d’expériences permettront d’identifier les évolutions qui permettraient de développer davantage le dispositif ».

Des propositions pour réussir à financer le reste à charge des plus modestes

Dans ce contexte et à l’aune de la rencontre prochaine entre les ministres Bruno Lemaire, Olivier Klein et les acteurs bancaires, il est impératif de trouver rapidement des solutions concrètes pour que les travaux de rénovation énergétique des plus modestes, puissent bénéficier de solutions de financement dédiées à cet effet plutôt que de recourir à des crédits à la consommation aux conditions moins avantageuses.


Puisque les Eco-PTZ ne sont quasiment pas distribués aux ménages des quatre premiers déciles, nous proposons de créer une banque de dernier recours de la rénovation énergétique. Ce dispositif, qui a été proposé par les Députés Philippe Bolo, Marie-Noëlle Battistel et Anthony Cellier[6], pourrait être incarné par une banque publique ou banque privée sélectionnée après appel à candidature ministériel. Cette banque aurait pour obligation d’émettre un Eco-PTZ à tout ménage éligible à la garantie du FGRE qui aurait fait l’objet de deux refus à ses demandes. Ce prêt serait par ailleurs garanti par le FGRE.

Au regard des chiffres précités, la garantie bancaire des prêts des ménages modestes au titre du FGRE ne joue pas son rôle. Plutôt qu’un énième prêt bénéficiant d’une garantie relevant d’un programme CEE qui ne fonctionnera pas mieux, nous proposons la mise en place d’un Prêt « Rénovation énergétique » garanti par l’Etat. Cette proposition également formulée par la Confédération de l’artisanat des petites entreprises du bâtiment (CAPEB)[7], permettrait de mettre en œuvre une formule bancaire dont le fonctionnement a été salué, notamment par la Cour des comptes[8], dans le cadre de sa mise en œuvre lors de la crise du COVID-19. Enfin, le financement des travaux de rénovation énergétique des ménages les plus modestes passera forcément par l’investissement des banques, qui font parti des acteurs clefs dans la réussite de la politique publique de performance énergétique et climatique du logement.

 

Plus d’articles sur ce thème