Précarité énergétique : un chantier toujours immense qui appelle des réponses

Cette semaine se déroule la seconde édition de la journée contre la précarité énergétique ainsi que le colloque de l’observatoire national de la précarité énergétique (ONPE). L’occasion de revenir sur ce fléau que les politiques publiques mises en œuvre n’arrivent pas encore à éradiquer ni réduire, notamment à l’aune des rapports budgétaires réalisés sur le projet de loi de finances 2023.

Une précarité énergétique qui ne diminue toujours pas

Dans un contexte où la consommation d’énergie est un sujet de préoccupation pour 84 % des Français[1], les indicateurs de précarité ne sont toujours pas en baisse. Selon l’observatoire de la rénovation énergétique (ONRE) il y aurait toujours 12 millions de personnes en situation de précarité énergétique[2], et un ménage sur quatre a rencontré des difficultés à payer ses factures d’énergie en 2021 (contre 10% en 2019)[3]. Ainsi, 60% des foyers auraient restreint leurs consommations d’énergie pour limiter leur facture énergétique, soit près du double du taux de 2019[4]. Si la période d’explosion des prix de l’énergie constitue un des éléments explicatifs, il n’en demeure pas moins que la qualité des logements est également une des principales causes.

Des sorties de passoires thermiques insuffisantes comme le soutien aux rénovations ambitieuses des plus modestes

Selon une enquête publiée vendredi dernier par l’ADEME[5], à l’occasion de la journée nationale de lutte contre la précarité, « pour la majorité des ménages suivis, c’est bien le fait d’avoir emménagé dans un logement en « mauvais état / dégradé » et/ou « énergivore » qui les a fait basculer dans la précarité énergétique ». L’ADEME estime dans son communiqué de presse que la réduction de la précarité énergétique suppose d’agir sur deux leviers dont un sur « la qualité thermique du logement »[6] dans un contexte où le parc de résidences principales est composé de 5,2 millions de passoires thermiques[7].

Comme le met en exergue le rapport budgétaire du Député Antoine Armand[8], le rythme de sortie des passoires thermiques est insuffisant par rapport à celui qui permettrait d’éradiquer l’ensemble des logements classés F et G d’ici à 2030. Selon les chiffres communiqués par l’Anah au rapporteur pour avis, les aides regroupées sous la bannière MaPrimeRénov’[9] auraient permis à 24 857 logements de sortir du statut de passoire thermique, quand il n’y en aurait que 13 358 entre le 1er janvier et le 25 septembre 2022 (dynamique en baisse).

Le financement des restes à charge des travaux de rénovation énergétique pour les ménages les plus modestes demeure également problématique. Selon le comité de suivi du plan de relance, une fois toutes les aides cumulées, les ménages très modestes avaient un reste à charge moyen de 38,6% au premier semestre 2021, quant celui des ménages modestes montait à 55,7 %.

Des moyens plus ambitieux pour rénover les passoires thermiques et les logements occupés par les plus modestes.

Comme le met en exergue le récent communiqué de presse de l’ADEME, « les situations de précarité énergétique des locataires sont plus délicates à démêler car s’il s’agit de convaincre les propriétaires bailleurs d’entreprendre des chantiers de rénovation ». Bien que la loi interdise progressivement entre 2023 et 2034 la location des biens les moins performantes, il demeure essentiel de renforcer l’accompagnement des propriétaires bailleurs afin qu’ils puissent entreprendre les travaux nécessaires. Le doublement du déficit foncier adopté par l’Assemblée nationale et le Sénat dans le cadre du PLFR 2022 n°2[10] est une avancée à saluer mais qui peut en appeler d’autres afin que les biens puissent toujours être loués tout en sortant des ménages de la précarité énergétique.

Pour les propriétaires occupants modestes et très modestes la rénovation énergétique de leurs logements passe par une réduction ou l’absence de reste à charge. Il demeure donc essentiel de renforcer les moyens budgétaires, notamment les aides MaPrimeRénov’, afin que ces publics prioritaires puissent avoir les moyens de disposer enfin d’un logement plus performant sur le plan énergétique comme climatique. La précarité énergétique est une priorité et le levier de la performance énergétique et climatique doit être rapidement utilisé, ce qui passera notamment par des moyens supérieurs à ceux actuellement déployés, notamment un budget de 2,45 Mds d’€ pour MaPrimeRénov qui demeure insuffisant au regard de l’enjeu et des objectifs.

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