CEE : Une proposition de hausse bienvenue dans l’attente de résultats concrets

Attendue depuis plusieurs mois par les professionnels de la rénovation énergétique mais aussi les Français qui ont vu leur prime décroître en raison de la baisse du prix du CEE, le Gouvernement vient d’annoncer une augmentation de 25% (environ 600 TWhcumac) de l’obligation CEE pour la 5ème période. Cependant, cette hausse annoncée dans le cadre du plan de sobriété suite à la première réunion du GT Logement, ne sera efficace que si elle produit son effet sur le marché des CEE avec un prix des certificats classiques et précarité qui repartent. Une annonce bienvenue dans l’attente de sa confirmation concrète dans un décret puis de premiers résultats qui appellera surement à des mesures complémentaires.

Contexte : une obligation pour la 5ème période sous-évaluée générant une chute du prix du CEE et des primes

L’obligation globale pour la 5ème période (2022-2025) était initialement fixée à 2500 TWh cumac dont 730 TWhc dédiés à l’obligation de précarité qui permet de financer des travaux chez les ménages les plus modestes. Cependant, la surproduction de certificats lors de la période précédente a généré des stocks de certificats, surtout précarité, qui sont reportés sur la nouvelle période. Cet effet est notamment dû aux modalités du dispositif pendant sa quatrième période ainsi qu’à l’impact de la crise sanitaire qui diminue l’obligation à réaliser en raison des moindres quantités d’énergie mises sur le marché. En l’absence d’une obligation permettant d’absorber cet « effet stock », les obligés ont déjà accompli une partie conséquente de leur nouvelle obligation. Cela a généré une chute des prix des CEE et donc des primes aux travaux de rénovation énergétique.

La logique de marché présidant au dispositif des CEE a pour conséquence concrète un effondrement du prix du CEE qui est récemment passé sous la barre des 6€. En février dernier, l’Initiative Rénovons !, dont nous sommes membre, alertait déjà les pouvoirs publics sur les conséquences de cette situation pour les ménages les plus précaires avec un prix des CEE précarité qui avait baissé de 30 à 40% en un an. La situation était donc d’autant plus urgente que cette baisse des aides à la rénovation énergétique s’inscrit dans un contexte de forte augmentation des prix de l’énergie, corrélée à un niveau de précarité énergétique qui peine à diminuer. Pourtant, les aides à la rénovation énergétique sont clefs dans le passage à l’acte vers des travaux qui constituent le véritable bouclier protecteur structurel contre la variation des prix de l’énergie. Cette situation affecte également tout le secteur de la rénovation énergétique. Selon le Syndicat National de l’Isolation, « 20 à 25 % des sociétés d’isolation ont déjà déposé le bilan, 40 % sont aussi prêtes à le faire »[1]. La situation est donc urgente tant pour les particuliers que les professionnels.

Une hausse de 600 TWhcumac : un premier pas dans le bon sens qui devra en appeler d’autres en cas d’insuffisance

Selon nos estimations réalisées sur la base du surplus de CEE résultant de la 4ème période, de l’impact de la crise Covid-19 sur le niveau de l’obligation et du gisement des CEE issus des Coups de Pouce réalisé en quatrième période qui seront à déposer en P5, le besoin de rehaussement de l’obligation était à minima de 800 TWhc. Cela représente une obligation totale de 3 300 TWhc. Bien qu’en deçà, le rehaussement de 25% de l’obligation annoncée par le Gouvernement[2], lorsqu'il sera confirmé dans les textes, constituera un bon début avec une obligation totale qui se situerait aux alentours de 3100 TWhc.

Cependant, la composition de cette hausse entre l'obligation CEE précarité et l'obligation CEE classique n’est pas précisée par le communiqué de presse du Ministère. Une part plus importante dédiée aux ménages précaires est nécessaire au regard du volume de stock reportés de la quatrième période qui sont très majoritairement des CEE « précarité énergétique ». Cela s’explique notamment par le fait que l’obligation de précarité énergétique en quatrième période visait un public plus large qui depuis a été recentré en cinquième période. Cette rallonge d’obligation devra, une fois en vigueur, permettre aux prix des certificats de repartir, notamment afin que les primes aux ménages les plus modestes soient à nouveau au rendez-vous et que les travaux chez les publics les plus prioritaires puissent être engagés. Ces annonces sont à notre sens une première étape qui doit rapidement en appeler d’autres si ce rehaussement ne s’avère pas rapidement suffisant pour que le marché redémarre. En effet, les ménages et tout l’écosystème de la rénovation énergétique sont affectés.

Encadrement des prix des CEE : absent des annonces

Le communiqué de presse précité n’évoque en revanche pas le sujet de l’encadrement du prix des CEE. Pourtant nous estimons qu’un encadrement pérenne des prix doit être mis en place sous la forme d’un corridor. D’après nos informations, il n’est pas prévu de modifier le niveau des primes coups de pouces et des programmes en CEE Classique. Par conséquent, ce corridor de prix pourrait s’établir pour le CEE Classique entre 7 et 10€/MWhcumac. Pour les CEE Précarité, compte tenu de la perte de bonification il faudra désormais un réel différentiel de prix et le corridor pourrait se situer entre 10 et 14€/MWhcumac. La mise en place de ce corridor pourrait assurer un rehaussement minimal rapide du prix. De manière plus structurelle il permettrait de donner plus de stabilité aux montant des primes dont bénéficient les ménages et de la visibilité pour tous les acteurs du dispositif et du secteur de la rénovation énergétique.

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