Efficacité énergétique des bâtiments : un rôle clef en matière d’indépendance énergétique

L’Agence internationale de l’Energie (AIE) a récemment publié son analyse 2022 de l’évolution et des politiques de l’efficacité énergétique. Dans un contexte de crise énergétique, le rapport fait le bilan des politiques publiques d’efficacité énergétique mises en œuvre à travers le monde et met en avant certains résultats. Quels sont les enseignements de ce rapport en matière de politiques publiques d’efficacité énergétique dans un contexte où la crise énergétique perdure ?

L’efficacité énergétique : une politique publique centrale où les bâtiments performants ont un rôle clef

L’AIE estime que les mesures mises en place ces 20 dernières années (bâtiment, de l'industrie et des transports) ont permis aux ménages et aux entreprises d’économiser environ 680 milliards de dollars cette année. Toujours selon l’agence, sans ces mesures la facture énergétique annuelle[1] aurait été de 15% supérieure. L'investissement mondial dans l'efficacité énergétique aurait augmenté pour se situer à 560 milliards d’euros cette année ce qui constituerait un record ! Forte de ce constat, l’agence internationale rappelle qu’une plus grande efficacité énergétique est la meilleure voie à suivre pour diminuer les factures d’énergie.

L’Agence prône également le rôle central de l’efficacité des bâtiments parmi lesquels on retrouve les logements. Parmi les politiques d’efficacité énergétique sectorielles, l’agence estime notamment que des bâtiments plus efficaces joueront un rôle clé pour permettre à l'Europe de devenir indépendante du gaz russe. Les réglementations en matière d'efficacité seraient à l’origine d’une réduction de la consommation de gaz de 21% en Europe pour le chauffage des locaux et l’eau chaude sanitaire des bâtiments. Selon elle, étant donné le contexte européen, les pompes à chaleur constituent également le meilleur choix à réaliser par les ménages pour réduire leurs factures d'énergie. Les travaux d’isolation sont également mis en avant par l’agence qui estime que les logements les mieux isolés peuvent utiliser jusqu’à un tiers seulement de l'énergie de bâtiments mal isolés.

Outils : Des obligations d’économies d’énergie qui se diffusent dans le monde

En matière de politique publique d’efficacité énergétique, le rapport de l’agence internationale met en exergue que les Etats-Unis et l’Union européenne recourent surtout à des instruments de marché qui reposent très majoritairement[2] sur les obligations d’efficacité énergétique (EEO’s) qui recouvrent notamment le mécanisme de « certificat blanc » matérialisé en France par le dispositif des certificats d’économies d’énergie (CEE). 23 pays dont 16 de l’Union européenne disposent d’un mécanisme d’obligation d’économies d’énergie de même que 24 Etats états-uniens. La Hongrie a lancé un mécanisme d’obligation d’efficacité énergétique en 2021 quand il serait en cours de développement en Corée du Sud ainsi qu’en Bosnie-Herzégovine.

Le rapport de l’AIE note que seulement 4% des dispositifs d’obligations d’efficacité énergétique ciblent exclusivement le secteur résidentiel. A l’image du dispositif des CEE français, la grande majorité des dispositifs englobent plusieurs secteurs.

Focus sur la France et l’Union européenne

A travers son paquet Fit-for 55 et son plan RePower Eu, l’Union européenne prévoit un renforcement substantiel des obligations d’économies à réaliser. Cependant, les négociations interinstitutionnelles n’ont pas encore abouti et l’objectif d’efficacité énergétique qui devrait passerait 13% en 2030 par rapport à 2020 n’est toujours pas en vigueur. Il en est de même pour la révision de la directive relative à l’efficacité énergétique des bâtiments, dont l’ambition est également renforcée. Il sera essentiel que les institutions de l’Union européenne soient au rendez-vous de l’efficacité énergétique contrairement à ce qui s’est récemment produit pour les énergies renouvelables[3].

A travers le dispositif des CEE, la France dispose d’un outil puissant au service notamment de la rénovation énergétique des logements. Cependant, après un faux-départ en début de cinquième période du dispositif, le niveau d’obligation a enfin été réhaussé. L’examen de la loi de programmation énergie-climat, qui devra proposer un corridor d’obligation d’économies d’énergie quinquennal, sera l’occasion de renforcer l’ambition du dispositif, notamment en cohérence avec les évolutions du droit communautaire. Plus globalement, il est essentiel de renforcer les moyens dédiés à la rénovation énergétique des logements avec notamment une augmentation des aides aux travaux d’isolation délaissés au profit des travaux de changement de système de chauffage dont les aides sont boostées. En matière d’efficacité énergétique des logements, les pouvoirs publics français et européens doivent impérativement être au rendez-vous en 2023, à défaut de l’avoir été pleinement en 2022 !

[1] Qui s’élèverait à 4 500 milliards de dollars selon l’AIE
[2] 96% des mesures de marché selon l’AIE
[3] https://www.euractiv.fr/section/energie/news/energies-renouvelables-le-combat-a-commence-pour-fixer-lobjectif-de-2030/

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