Précarité énergétique : les propriétaires occupants sont plus nombreux à subir la précarité énergétique sur un temps long

Pendant un an, l’Observatoire national de la précarité énergétique a suivi un groupe de 30 ménages précaires pour identifier quels étaient les freins et les leviers mis en place pour leur permettre de sortir de ce statut. Les résultats de l’enquête ont été dévoilés lors du Colloque de lutte contre la précarité énergétique organisé ce mercredi 23 novembre, par la Fondation Abbé Pierre.

Colloque précarité énergétique

Lors du Colloque de lutte contre la précarité énergétique, l'ONPE est revenu sur sa dernière enquête réalisée sur 30 ménages en situation de précarité énergétique. ©Mariana Gonçalves

Ce mercredi 23 novembre, se tenait le Colloque de lutte contre la précarité énergétique organisé par la Fondation Abbé Pierre. L’occasion de revenir sur la dernière étude de l’Observatoire national de la précarité énergétique. L’ONPE a suivi pendant un an, 30 ménages en situation de précarité énergétique pour tenter de comprendre les freins et les leviers leur permettant de sortir de ce statut(1).

 

“L’étude a permis de faire émerger différents profils” explique Isolde Devalière, Cheffe de projet précarité énergétique Ademe / ONPE. “Le premier est celui des locataires qui peuvent être accompagnés et sortir de manière momentanée du statut de précarité énergétique, et le second est celui des propriétaires occupants, qui connaissent un parcours plus complexe pour sortir de ce statut”.

 

L’enquête révèle ainsi que les propriétaires occupants sont proportionnellement “plus nombreux que les locataires à subir sur un temps long la précarité énergétique”. En cause, leur attachement affectif à leur logement, leur accommodement plus important à l’inconfort et le sentiment d’échec que peut susciter la sollicitation d’une aide à l’extérieur.

Trois facteurs de basculement dans la précarité énergétique

Qu’est-ce qui fait que l’on bascule dans une situation de précarité énergétique ? En analysant les parcours des ménages suivis, l’enquête identifie 3 facteurs : 

 

  • l’emménagement dans un logement énergivore : un logement mal isolé et mal chauffé entraîne un “surcoût” de l’énergie pour les ménages modestes. Pour y faire face, ils restreignent leur consommation ou se privent (diminution du chauffage, factures impayées, privations au niveau alimentaire ou vestimentaire…) ;
  • les accidents de parcours et/ou les déséquilibres budgétaires : une séparation, des problèmes de santé, un accident, sont autant d’événements qui peuvent faire basculer les ménages dans une situation de précarité énergétique ;
  • la dégradation du logement ou les capacités des personnes : rénover un logement insalubre représente un coût financier important pour les ménages.

 

Lire aussi : Précarité énergétique : 60% des Français déclarent avoir restreint le chauffage pour éviter des factures trop élevées

Sortir de la précarité énergétique : quelles solutions ?

Sortir du statut de précarité énergétique n’est pas chose facile. “La rénovation lourde des logements est la clé de sortie de ce statut” estime Isolde Devalière. L’étude révèle ainsi que les propriétaires occupants ont pu, grâce à l’octroi de plusieurs aides existantes pour la rénovation de leur logement, sortir de ce statut de précarité énergétique. Mais l’accompagnement doit aussi être moral. “L’accompagnement moral tout au long du parcours est la clé : c’est ce qui fait la différence entre un ménage qui va jusqu’au bout du parcours et un ménage qui va lâcher car il se sent abandonné ou non valorisé”.

 

Concernant les locataires, ils se heurtent aux contraintes des propriétaires bailleurs, qui priorisent les travaux d’embellissement. “Il est nécessaire de penser des politiques publiques conjuguées aux contraintes des bailleurs” estime Coralie Robert, Docteure en sociologie / Urbaniste, citant leur nécessité de percevoir des revenus pour financer leur prêt immobilier et leurs charges, les aides financières, etc.

La crainte d’une expulsion : l'angoisse principale des ménages précaires

Depuis la crise sanitaire, la moitié des ménages en situation de précarité disposent d’un reste à vivre de “5€ par jour et par personne”(2). Dans un contexte d’inflation, le Secours Catholique alerte sur l’arbitrage réalisé par les ménages entre le paiement de leur loyer et de leurs factures d’énergie. En 2021, 39% des impayés concernaient ainsi les dépenses de gaz, d’électricité et de combustibles. 

 

Les privations ont un impact “sur la santé mentale, physique et créent de l’isolement. Certains ménages ont même un sentiment de honte de leur situation” indique Jean Merckaert, Directeur Action Plaidoyer du Secours Catholique. Il dénonce ainsi un “quotidien de sobriété subie” pour ces ménages dont la principale angoisse est de subir une expulsion de leur logement.

 

L’association révèle ainsi que les dépenses pré-engagées (loyer, énergie, téléphone…) représentent près de 60% des ressources disponibles, soit deux fois plus que pour l’ensemble des ménages français. L’énergie à elle seule, représente 7% de leur budget. 


(1)Source : Enquête longitudinale de l’ONPE réalisée sur 30 ménages en situation de précarité énergétique : Les leviers et les freins à la sortie de la précarité énergétique
(2)Source : Rapport du Secours Catholique : Etat de la pauvreté en France en 2022, d’après les statistiques d’accueil 2021 du Secours Catholique - Caritas France, 46 000 fiches statistiques recueillies dans les 72 délégations de l’association

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